Les agriculteurs marnais aux petits soins des abeilles
C'est au sein du magasin de produits artisanaux attenant à sa ferme Terre de Coeur que Benoît Collard, secrétaire général de l'association Symbiose et agriculteur à Somme-Tourbe, nous reçoit ce mardi 8 juin par une belle après-midi printanière.
Avec son épouse Isabelle et son fils Jean-Baptiste, il cultive luzerne, céréales, pommes de terre, betteraves à sucre et élève en plein-air des volailles fermières (poulets, chapons, pintades et dindes rouges des Ardennes).
L'exploitation familiale est entièrement conduite en agriculture raisonnée, certifiée Haute valeur environnementale (HVE) de niveau 3, contribuant à l'amélioration de la biodiversité par de nombreux aménagements sur les parcelles.
Apiluz : un projet original pour favoriser la biodiversité locale
Lunettes de soleil juchées sur le nez et polo bleu pâle de circonstance avec le retour des beaux jours, l'agriculteur nous a donné rendez-vous pour nous parler du projet Apiluz, auquel il participe activement.
Pilotée par Symbiose, cette opération, sans précédent en France, consiste à laisser fleurir une bande de 3 mètres de large de luzerne le long de parcelles agricoles sur tout le territoire de l'ex région Champagne-Ardenne.
Le but est d'offrir aux insectes pollinisateurs des ressources mellifères et nectarifères suffisantes durant la période de récolte (juin-juillet), qui correspond pour eux à une période de disette alimentaire.
"Une fois la luzerne en fleur, ce non-fauchage assure en effet un bol alimentaire conséquent pour les abeilles et les autres pollinisateurs au moment des récoltes en été", explique Benoit Collard. "Il faut savoir qu'un seul hectare de bande de luzerne non fauchée fait vivre quelque 160.000 abeilles et constitue une vraie niche écologique pour d'autres espèces", poursuit-il.
Le projet Apiluz, que soutient le Département de la Marne, touche environ 3.000 agriculteurs répartis sur 50.000 hectares de 750 communes rurales.
Il est mené en lien étroit avec les apiculteurs, les coopératives de déshydratation de luzerne et de nombreux financeurs, tels que Lidl, la Fondation Avril, la Fondation du Crédit agricole Nord-Est, la Chambre d'agriculture de la Marne...
L'expérimentation avant la généralisation
Apiluz a d'abord été expérimenté à Beine-Nauroy entre 2014 et 2016. Au niveau des bandes de luzerne non fauchées, on a rapidement constaté une hausse de 20 % de la fréquentation des abeilles et des papillons ou encore un doublement de la période de floraison.
Les apiculteurs du secteur ont parallèlement pu augmenter leur production de miel suivant l'activité plus intense des abeilles, ravies d'avoir un bol alimentaire varié et en quantité suffisante à proximité.
"C'est en remarquant que les abeilles mais aussi les papillons étaient de plus en plus nombreux sur ce site d'expérimentation que nous avons décidé de déployer cette pratique", termine l'agriculteur.
À terme, 1.700 kilomètres de bandes de luzerne ne seront pas fauchées, qui deviendront autant de garde-manger capables de faire vivre environ 100 millions d'abeilles.